Qui détient les cartes du pouvoir ?

Les Cartes du pouvoir

Adaptation de Farraguth North, de Beau Willimon  (elle-même à l’écran dans les Marches du pouvoir), Les Cartes du Pouvoir mis en scène par Ladislas Chollat donne à voir la politique sous son aspect le plus sombre. On exulte de cynisme.

© Photo Lot/Service de presse
© Photo Lot/Service de presse

 

Une tension maximale

L’action se situe en pleine campagne présidentielle, aux Etats-Unis. Stephen Bellamy (Raphaël Personnaz, précédemment interviewé ici), est le brillant attaché de presse et conseiller de campagne du gouverneur Morris. Aux côtés de Paul Zara (Thierry Frémont), directeur de campagne dont il a toute la confiance, il prépare les primaires qui leur donnerait accès à la Maison Blanche.

Le contexte est tendu, tout repose sur les voix d’un Etat stratégique et les équipes de campagne sont au paroxysme de la pression. Stephen (appelé Steevie tout au long de la pièce) a gagné les faveurs d’une journaliste du Times, Ida Horowicz (Elodie Navarre) en lui fournissant régulièrement de la matière pour ses futurs articles…et en jouant de son charme. On comprend alors tout le poids de la presse en matière de stratégie politique.

Parfaitement crédible, la pièce montre à quel point la politique prend le pas sur la vie privée. A aucun moment on ne fait référence à une épouse pour Paul Zara; en revanche, on comprend aisément que c’est ce milieu très prenant qui a ruiné la relation amoureuse du jeune Bellamy.

Un univers impitoyable

Là où la pièce prend tout son sens c’est dans la psychologie de ses personnages. A travers leurs agissements, on sait tout de la loyauté des politiques (ou plutôt de celle qui leur fait défaut), mais aussi de leurs stratégies. Entre bluff, coups bas et esbroufes, aucun coup ne sera épargné pour être favori à la présidentielle.

La pièce nous montre à quel point la politique peut ronger les passionnés, le personnage de Steevie en est l’incarnation même. La politique prend une telle place dans son existence qu’il se retrouve orphelin sans elle, sans but ni envie. Tel un monstre tentaculaire, elle finit par tout broyer, même l’essentiel.

Un cynisme éclairé

Si les différents personnages sont particulièrement cruels entre eux, on doit leur reconnaître la formidable lucidité dont ils font preuve. Lorsque Steevie rencontre la petite stagiaire (incarnée par Roxane Duran), il la perce tout de suite à jour. Elle a besoin de séduire, pour se rassurer. Du haut de ses 19 ans, elle fait pourtant preuve d’une maturité à toute épreuve, ce qui  épate sans doute le jeune attaché de presse.

Quant aux personnages plus expérimentés (on songe notamment à Paul Zara et le directeur de campagne du camp adverse), ils manient l’art de la manipulation avec une grande dextérité. L’expérience, sans doute… Capable du meilleur comme du pire, ils sont prêts à tout faire de leur camp, l’ultime vainqueur.

En somme, Les cartes du Pouvoir est un pièce remarquablement écrite, à l’intrigue savoureuse et au jeu des plus intenses. Raphaël Personnaz et Thierry Frémont livrent une performance épatante qui ne peut que capter l’attention et nous faire passer 2h en plein coeur des coulisses de la politique, dans ce qu’elle a de plus noble, mais surtout, de plus vil.

Machiavel n’est jamais loin….


au 

Théâtre Hebertot, 78 bis boulevard des Batignoles 17è.

 

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