Le règne animal : homo homini lupus est

le règne animal film

Dix après Les Combattants, Thomas Cailley revient avec le Règne animal, un film où se mêlent les genres, entre dystopie, body horror (coucou Teddy des frères Boukherma), teen movie, frôlant même avec le conte initiatique.

L’homme est un loup pour l’homme

L’intrigue se passe de nos jours, des créatures envahissent alors le paysage français ; aussi menaçantes que difficiles à contenir, elles sèment effroi et chaos sur leur passage. Un père et son ado de fils, portés par Romain Duris et Paul Kircher déménagent pour suivre la mère de ce foyer morcelé depuis la transformation de cette dernière en « créatures » comme ils les appellent. A la suite de « mutations », des gens comme vous et moi sont devenues ces fameuses créatures, fort impressionnantes, au départ mi-hommes mi-animaux avant de laisser part belle à une transformation totale qui aboutira en effet au règne animal dans toute sa splendeur.

Une mère reste une mère

François (R. Duris) et Emile (P. Kircher) se lancent à la recherche éperdue de cette épouse et mère disparue à travers la forêt foisonnante, luxuriante du Sud de la France. Cette quête donne à voir de superbes scènes de cinéma : pour cause, la photographie du film a été couronnée d’un César.

Quelle que soit l’avancement de sa transformation physique, il est clair que la mère d’Emile reste sa mère. Cet instinct proche de l’animalité questionne au bon endroit la maternité, dans ce qu’elle a en effet de plus primaire.

Il en va de même pour la jeune créature proche du caméléon qui suit partout Fix (mi-homme, mi-oiseau) : ne peut-on penser qu’il s’agirait de sa fille ? Une telle hypothèse semble en tous cas totalement crédible. Là encore, cette relation nous touche presque viscéralement.

Free creatures et métaphores d’ailleurs

On ignore toujours pourquoi un film marche : on peut évidemment l’attribuer à un bon scénario (la base !), le jeu d’acteurs, les décors… Mais ce qui fait AUSSI que Le règne animal a touché tant de spectateurs, membres de l’Académie des César compris, c’est sans doute sa portée universelle, d’où le fameux conte initiatique.

Emile découvre l’amour et l’amitié de façon aussi plurielle que singulière. Dans les deux cas, ces axes narratifs seront développés de telle sorte qu’on s’attachera à ces relations polymorphes.

Quant à ces créatures dont on a peur : qui sont-elles aussi ? Les étrangers ? On évoquerait alors le racisme en filigrane, à travers cette peur de l’autre, dans ce qu’il a de plus différent de nous. Cet état d’urgence, couvre-feu en premier lieu nous ramène également aux heures les plus sombres de cette pandémie de Covid, bridant alors la liberté des jeunes et de tous, sous couvert de protection sanitaire -à juste titre.

Enfin, parce qu’il est aussi pluriel que complexe, ce film embrasse tous les sujets à travers ces créatures et d’aucuns lui reprochent un manque de direction claire, d’autres et ils sont nombreux, se sont juste laissés étreindre et porter par ce règne animal qui viendra peut-être, qu’on n’attend sûrement pas mais qu’on a pu, le temps de ces 2 heures 7, appréhender à travers le génie d’un certain Thomas Cailley qui nous prouve qu’il faut accepter notre vraie nature, quelle qu’elle soit ou sera.

 

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