1ère projection presse déconfinée / Effacer l’historique, connectés mais esseulés ; solitaires mais solidaires.

Effacer l'historique
Après l’ovni I feel good, le duo Grolandais Kervern-Delépine revient avec une comédie sociale qui semble déjà faire l’unanimité, et on comprend pourquoi. En réunissant les ingrédients d’une tragi-comédie intelligente et bien ficelée, des gags extrêmement drôles et variés, ces ultra originaux au ton bien singulier tiennent là un succès qui ne sera pas prêt de s’effacer dans l’historique de leur filmographie.
Le synopsis ?

 

Des voisins d’un lotissement du Nord de la France, à Arras, pris au piège des nouvelles technologies et des réseaux sociaux.

Effacer l’historique et ses victimes du système

 

Différents types de personnages composent le film.

 

Marie (Blanche Gardin) vit seule, désespérément seule, à la suite de sa séparation. Son fils, qui a préféré vivre chez son père, semble cruellement lui manquer. Un soir plus alcoolisé que les autres, elle cède aux avances d’un jeune homme (Vincent Lacoste). Le lendemain, hébétée et sans souvenir, elle reçoit une menace de chantage à la sextape. Marie tente alors de réunir la somme de 10 000€.
 Bertrand (Denis Podalydès) vit seul avec sa fille. Victime de harcèlement au lycée, une vidéo de la dite humiliation est alors visible sur Facebook et son père entend bien la faire effacer.
 Christine (Corinne Masiero) est chauffeur VTC et son système de notation stagne à une étoile malgré toute sa (relative) sollicitude à l’égard des clients.
Autour de ces trois personnages, un même dénominateur commun : ils sont victimes du système. Un système fait de crédits à la consommation, de factures aberrantes, d’objets abracadabrants (une machine à tarama !?).
Et pourtant, ces personnages tentent de s’en sortir via cette même technologie, à la fois délétère et salvatrice.

 

Le duo de réalisateurs a réussi à capturer avec une finesse remarquable toutes les subtilités de notre monde moderne et de cette technologie, amie-ennemie. Et ce, sous tous ses aspects ce qui est suffisamment rare pour être souligné.

Effacer l’historique et ses personnages forts malgré une apparente vulnérabilité

 

Ce qui est prégnant dans la personnalité de ce trio de protagonistes, c’est sans doute leur force de caractère. Ce ne sont pas des fatalistes : ils refusent d’être écrasés par la nébuleuse technologique. S’ils n’ont pas toujours de prise sur les gens dans la vraie vie, ils entendent bien combattre la source du système. Parfois ce sont des êtres faits de chair et d’os, parfois pas mais la volonté est la même, l’élan d’espoir, immuable.
C’est d’ailleurs cette force individuelle qui s’accentue d’autant lorsqu’elle est collective qui est mise en avant dans le film. Ce collectif, c’est initialement celui des gilets jaunes.
effacer l'historique
© Les Films du Worso / No Money Productions

Effacer l’historique, la force du collectif connecté

A l’origine de cette histoire, un seul personnage : un gilet jaune avant l’heure (le personnage incarné par Blanche Gardin). Mais la première version du film a été écrite juste avant le déclenchement de ce mouvement. Par peur d’opportunisme, les réalisateurs et scénaristes ont finalement écrit pour trois protagonistes. Bien que leurs problématiques soient différentes, ils finissent tous par se rejoindre et s’entraider : non seulement ils ne sont pas seuls dans leurs luttes individuelles et menées conjointement mais celles-ci ravivent le souvenir des gilets jaunes qu’ils étaient.

Effacer l’historique,  c’est un film tragi comique, dans lequel, du propre aveu de Gustave Kervern « diffèrents registres se mêlent ». Aux spectateurs de définir si la tragédie prend le pas sur la comédie, même si pour l’un de ses auteurs, la réponse est nettement tranchée.

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