Babygirl, go girl, go !

BABYGIRL

Vu à l’occasion des projections en avant-première du Club Allociné (merci encore), ce premier film de la norvégienne Halina Reijn met en scène Nicole Kidman en dirigeante d’entreprise, mariée et deux enfants, en proie à des désirs (dits) tourmentés. Le pitch étant posé, tout l’enjeu sera de savoir quel en sera le traitement puisque n’étant pas très original.

 

La vie est longue, et le désir, sans faim

Avec un casting pareil, j’ai nommé Nicole Kidman, Antoni Banderas (encore et toujours) et le très remarquable Harris Dickinson (Sans filtre mais pas que), on pensait que ce thriller érotique nous ferait un peu perdre la tête un soir glacé de janvier. Queue nenni, il nous a au contraire fait beaucoup réfléchir. La chair est-elle hélas triste pour autant ? Heureusement, non.

Si le female gaze est tout à fait justement représenté, le film n’épargne aucun cliché renversé : on met cette fois dans la peau de la toute-puissance une femme. On interroge son désir, désir qu’elle n’ose pas s’avouer. Fantasmes qu’elle n’ose réaliser à plus de 50 ans, une situation dont elle souffre profondément : elle ne cesse de se dire « je ne suis pas normale. »

 

Babygirl, entre soumission et émancipation

SI ce film interroge le désir féminin, il met également en exergue toutes les difficultés des hommes à oser ou non s’y soumettre à l’ère post me too. En cela, le personnage de Samuel (Harris Dickinson), ce jeune stagiaire mi gauche mi ténébreux peut paraître tour à tour pleutre, maladroit voire falot. Néanmoins, il a quelques ambivalences dans son attitude qui le rendent clairement antipathique, oserait-on dire, calculateur. 

Crédit photo : SND
Crédit photo : SND

Babygirl, le pouvoir féminin en première ligne 

Tel un concept, c’est bien la sexualité féminine qui est interrogée. Impossible de ne pas réitérer le fameux female gaze dont on parle souvent au cinéma et plus largement ces dernières années. Ce cinéma réalisé par des femmes qui interrogent enfin le vrai désir des femmes : Céline Sciamma dans son Portrait de la jeune fille en feu , plus récemment, Audrey Diwan avec sa version très revisitée arts et essai d’Emmanuelle, et d’ailleurs Noémie Merlant elle-même dans sa dernière réalisation, les femmes au balcon. Le dénominateur commun (outre Noémie Merlant), c’est de se réapproprier un regard proprement féminin et de cesser de projeter des fantasmes masculins sur le désir féminin. 

Babygirl, un rôle à Oscar pour Nicole Kidman ?

Si elle peut perturber par le botox/collagène de ses lèvres, et même tout son visage sans parler de ses seins refaits, l’actrice brille une fois encore par son talent. A la vision du film, on peut aisément comprendre que le rôle est très éprouvant à jouer pour toute comédienne. Elle s’y plonge avec une abnégation assez folle. Elle émeut autant qu’elle séduit par son corps parfait à presque la soixantaine, bref elle touche en plein coeur et déploie une fois encore toute sa vaste panoplie d’actrice, de grande Actrice.

La messe est dite. Le film est très cinéphile, pas très cul, mais très cérébral. A vous de voir.

Ce film a été vu en avant première dans le cadre du Club Allociné, il a été suivi d’une rencontre passionnante animée par la journaliste Brigitte Baronnet, journaliste AlloCiné, Nathalie Chifflet, journaliste cinéma et présidente du syndicat français de la critique de cinéma, et Camille Aumont Carnel, leadeuse d’opinion et militante féministe.

 

*Interdit – 12 ans en salles.

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