Kim Chapiron : la crème de la crème du cinéma français

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Bourdieu n’est jamais loin

La crème de la crème c’est avant tout HEC, cette élite de la nation, nos futurs cadres sup dynamiques, le haut de la pyramide. Mais avant d’en arriver là, il y a le milieu social. Ce film c’est aussi ça, le destin de 3 ou 4 jeunes gens qui sont issus de classes supérieures (er préparatoires), exceptée Kelly (qui se fait appeler Kelia, car plus exotique, moins Beverly Hills). Ce clivage n’aura de cesse de se dessiner en filigrane. Sur ce point, le réalisateur ne semble pas prendre parti; il s’attache seulement à dépeindre une réalité sociale dans son intégrité absolue. Nul jugement dans sa démarche.

HEC c’est aussi cet univers fait de clubs, que l’on nommerait confréries aux Etats-Unis. Chaque club a sa propre identité, ses propres codes…idem pour ses membres : on a les rugbymen gonflés de testostérone, les membres « cool » du BDE (voire débonnaires) etc. A cette école comme dans tant d’autres, on doit représenter une catégorie bien particulière, notre identité se résume à une étiquette. Cette ultra normalisation (comparable à une forme d’économie), soit on l’accepte, soit on est seul.  L’enjeu de réseauter est alors court circuité et l’intérêt de toutes ces écoles, presque réduit à néant.

L’économie du corps

Cette histoire c’est aussi celle d’une économie de marché, où tout est basé sur la côte de la popularité, la loi de l’offre et de la demande. L’économie oui, mais pas seulement : le fameux concept du désir mimétique selon René Girard traverse le film de Kim Chapiron de part en part. Cette théorie est simple : je désire un objet car quelqu’un d’autre le désire. C’est ainsi que la côte s’accroît (ce qui arrive au personnage de Jafar).

Cette transposition de les lois de l’économie appliqués à l’humain est très judicieuse car elle révèle précisément les conséquences fâcheuses d’une application trop systématique des cours enseignés. Kelly ne dit-elle pas qu’ils sont leurs meilleurs élèves. Pour sûr, Dan, Louis et elle le sont : ils ont un temps d’avance sur les désirs des autres. Ils ont compris le système. Ils sont la crème de la crème.

Des acteurs au diapason

Les trois acteurs principaux, Baptiste Lafarge, Thomas Blumenthal et Alice Isaaz nous livrent un jeu d’une précision déconcertante. Tant de talent alors que leur carrière est si jeune, force l’admiration. Kelly, le personnage incarné par Alice Isaaz est sur la défensive, toujours dans le contrôle, alors que Louis (Jean-Baptiste Lafarge) est a contrario très impulsif, fougueux et même dominateur. Entre ces deux fortes personnalités, il y a Dan (Thomas Blumenthal), un personnage qui semble être la voix de la raison, toujours très mesuré dans ses propos, et d’une rare justesse dans la réflexion. Pour autant, il sait s’abandonner, que ce soit avec ses amis ou dans les bras d’une jeune femme. Finalement, le personnage de Dan, c’est la tempérance entre le feu (Louis) et la glace (Kelly)…. Bien sûr, on peut trouver cette analyse par trop réductrice, à vous de vous faire votre propre idée.

La crème de la crème n’a jamais si bien porté son nom, grâce à Kim Chapiron.

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2 commentaire sur “Kim Chapiron : la crème de la crème du cinéma français

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