La fracture solidaire

Copyright CHAZ Productions

Il y a ces films qui dégagent une atmosphère si prégnante qu’on est plongé dans un bain sensoriel complet : on sent la sueur, le sang, le bruit ; on ressent la douleur, aussi. C’est dans un hôpital en crise, évidemment en crise, que Catherine Corsini pose la caméra de son dernier film.

Toutes les fractures

La fracture originelle du film, c’est celle de Raf (Valéria Bruni Tedeschi) qui est tombée sur son coude pour rattraper Julie (Marina Foïs) alors qu’elles sont en pleine séparation. Une chute consécutive à une rupture, donc.
La seconde fracture, c’est la fracture sociale : celle de Yann (Pio Marmaï), gilet jaune. Blessé à la jambe à la suite d’une altercation avec les forces de l’ordre. Une autre chute consécutive à une rupture.
La suite est à cette image : un hôpital à l’agonie. Des patients excédés, des patients à la fois désespérés et résignés. Au fond, c’est cet hôpital qui réunit ces fractures, qui les subit aussi et de plein fouet. L’humain réduit au profit des économies.

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Tout ce qui nous lie

En nous livrant ces fractures en pâture, Catherine Corsini s’attache pourtant à montrer tout ce qui les colmate. L’humanité sous les différences sociales, sous les uniformes ou les statuts. C’est cette infirmière, à la scène comme à la ville, « interprétée » par Aissatou DIALLO SAGNA qui créé du lien malgré les fractures, porte ses patients à bout de bras pour rendre leurs maux un peu plus supportables. La solidarité se joue également dans les rapports entre Yann et Raf (Pio Marmaï et Valéria Bruni Tedeschi), le routier désabusé et la dessinatrice bourgeoise bientôt au chômage technique. Elle lui cède son lit pour soulager sa jambe, après qu’une dispute houleuse a éclaté entre eux. On pourrait multiplier les exemples en réalité, car cette solidarité se joue à de multiples endroits : entre un policier et un gilet jaune, entre une femme enceinte à qui Raf cède son lit… les exemples sont pléthore.

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