Frantz, la reconstruction selon Ozon

frantz_ozon

 

Après avoir exploré les terrains de la prostitution lycéenne, du genre, de la manipulation mais aussi du désir, de la beauté et surtout, de la vérité, François Ozon tend à approfondir cette notion à travers Frantz. Son dernier film éponyme tourne autour d’un personnage disparu dans les tranchées de la Grande Guerre et des survivants qu’il laissera après lui.

Frantz, entre réincarnation et reconstruction 

Pierre Niney incarne Adrien, un jeune Français revenu du front, qui s’en est sorti physiquement indemne, contrairement à son ami Frantz. Epris de douleur, il n’a qu’une idée en tête : retrouver les proches du jeune homme défunt pour leur parler de celui qui fut son ami, malgré les réactions que suscitent la présence d’un ex ennemi national sur le territoire allemand. En plein deuil, les parents de Frantz et sa fiancée, Anna, accueillent peu à peu Adrien dans leur vie et lui font une place qui est cruciale dans leur propre reconstruction. Pourtant Adrien cache un lourd secret qui pourrait mettre cet équilibre et la joie de vivre retrouvée en péril.

Frantz ou la place du mensonge 

Découvrant le secret d’Adrien, Anna (Paula Beer) se pose mille questions quant à la portée de la vérité. Nourrissant une réflexion plus qu’intéressante autour du mensonge, François Ozon place son spectateur dans une position de choix. Au fond, quelles sont les motivations profondes qui poussent à dire la vérité, coûte que coûte (Comprenez par là, peu importe les conséquences pour autrui, et même ceux que l’on aime). Selon le réalisateur, le mensonge est différemment perçu selon les protagonistes dont il est question. En effet, il est envisagé comme une trahison selon Adrien, puis ensuite Anna avant d’être reconsidéré comme une manière de préserver les êtres aimés, pour éviter de leur faire trop mal avec nulle autre raison que celle de connaitre la vérité.

mostra-de-venise-2016-ozon-oeuvre-au-rapprochement-franco-allemandm367456

Frantz, cette audace cinématographique

En filmant l’essentiel de son film en noir et blanc, le réalisateur a opté pour un parti pris audacieux. Les quelques instants de couleur revêtent une signification particulière : le souvenir ou la joie, parfois les deux. En dialoguant la plupart de son film en allemand, Ozon a lancé un challenge à Pierre Niney qui le relève avec brio. Doté d’un jeu toute en tension, à l’image du tourment de son personnage, il éblouit ses scènes dépourvues de couleur. 

Frantz et le courage d’une femme

Comme dans bon nombre de ses films, Frantz laisse la part belle à la femme courage. Qu’il s’agisse d’Anna, ou de la mère de Frantz, toutes deux incarnent des figures féminines fortes. On ne peut que compatir avec Anna, solide derrière sa beauté sylphide et son apparente fragilité, à la manière d’une Romy Schneider. Son parcours tel qu’il a été pensé par F. Ozon ne peut qu’émouvoir le spectateur que l’on est, la femme aussi. On fait ce combat avec elle, tel un parcours initiatique pour se retrouver, sans Frantz. Car ce film c’est aussi ça, savoir vivre avec l’absence…

A noter que les trois protagonistes de cette aventure, réalisateurs compris, sont nommés aux Césars 2017, et comme ils le méritent !

Share